Le concept de vulnérabilité et ses limites dans l’analyse des socio-écosystèmes exploités - AMURE-Centre de droit et d'économie de la mer Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2023

El concepto de vulnerabilidad y sus límites en el análisis de los socioecosistemas explotados

Le concept de vulnérabilité et ses limites dans l’analyse des socio-écosystèmes exploités

Résumé

Le concept de vulnérabilité est largement mobilisé par de nombreuses disciplines pour évaluer le degré de fragilité ou de robustesse d’un système, d’individus ou d’un collectif. Il s’agit dans la plupart des cas d’évaluer leur état face à des changements d’origine externe pouvant entrainer des impacts sur les individus ou les systèmes exposés. De nombreux travaux se réfèrent à la formulation mathématique de la vulnérabilité initialement proposés par les sciences de la nature (White , 2005). La vulnérabilité est ainsi directement proportionnelle aux risques auxquelles l’objet étudié est soumis, à la sensibilité face à ces risques et inversement proportionnelle à la capacité de réponse ou d’adaptation pour surmonter des éventuels impacts. Cette formulation fonctionnelle de la vulnérabilité est relativement opérationnelle pour évaluer des événements dont on n’a aucune emprise. C’est le cas par exemple des situations de risques sismiques, des risques environnementaux comme l’érosion côtière, les risques d’inondations etc. S’agissant de risques externes non maitrisables, l’intérêt est de comprendre comment un changement produit des effets hétérogènes en fonction des caractéristiques des individus exposés et d’explorer les meilleures réponses à engager en termes d’adaptation. Ce cadre d’analyse de la vulnérabilité est en revanche moins opérationnel dans le cas des systèmes de production de ressources naturelles renouvelables lesquels ont un lien étroit avec les risques environnementaux. Tout système de production fondé sur l’exploitation des ressources naturelles renouvelables est amené à changer au gré des innovations, des décisions privées et publiques, de la dynamique environnementale, entre autres. L’accumulation dans le temps de ces changements façonne la trajectoire d’évolution de ces systèmes de production. Dans des nombreux cas, ces trajectoires s’avèrent instables, sensibles aux changements, ou plus « fragiles » en comparaison avec les configurations précédentes. Le cadre d’analyse de la vulnérabilité peut éclairer sur les facteurs qui conduisent à cette évolution « vulnérabilisante ». Cependant, dans ce cas de figure des systèmes de production de ressources naturelles renouvelables, il existe des processus endogènes issus de comportements des individus qui sont susceptibles de modifier, et donc agir, sur les risques qui peuvent ensuite mettre en question la durabilité de ces systèmes. De plus, il existe également une difficulté pour faire la part entre ce qui relève de la sensibilité face au risque et la capacité à agir, ce qui difficulté davantage la mobilisation de cette formulation de la vulnérabilité.    Pour surmonter les limites de la vulnérabilité, l’approche de la capabilité (Sen, 1996), principalement utilisée pour étudier les problèmes liés à la pauvreté, offre un cadre plus adapté pour comprendre la dynamique des socio-écosystèmes à partir des comportements des individus entre eux et avec leur écosystème. Pour cela, Sen définit deux dimensions fondamentales : les potentialités et les capacités. La capabilité d’un individu est alors définie comme « l’étendue des possibilités réelles que possède un individu de faire et d’être » ou encore «les combinaisons alternatives de fonctionnement qu’un individu peut réaliser, et parmi lesquelles il peut en choisir quelques-unes ». La notion de capabilité exprime alors l’ensemble des choix possibles d’un individu (Bertin, 2008). Dans un sens complémentaire vulnérabilité est appréhendée en tant que « non capacité » à s’adapter (Gondard-Delcroix et Rousseau), l’adaptation étant la capacité de substituer certaines capabilités par d’autres. Un agent est donc résilient lorsque, à la suite d’un choc qui déstabilise sa structure de capabilités, il est en mesure, par une réallocation de ses potentialités, de faire face à la situation. Dans le cas contraire, il est vulnérable (Ballet et al, 2004). Concrètement, l’approche par la capabilité vise à analyser deux dimensions : (1) la quantité de solutions qu’un individu peut mettre en place suite à un choc exogène ; plus un individu peut réallouer ses potentialités pour regagner ou redéfinir des capabilités, moins il sera vulnérable et (2) l’efficacité des choix élaborés pour faire face à un choc, c’est-à-dire, le choix ne doit pas être trop coûteux. La capabilité offre ainsi un cadre permettant de construire une « analyse économique basée sur le concept de vulnérabilité » et de la transposer au cas des systèmes de production de ressources naturelles renouvelables. Entre faible opérationnalité du cadre traditionnel de la vulnérabilité et complexité pour explorer la durabilité, la capabilité vise à mieux comprendre la relation entre opportunités, comportements et dynamique des socio-écosystèmes qui se fragilisent ou se consolident.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-04309721 , version 1 (27-11-2023)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04309721 , version 1

Citer

José A. Pérez Agúndez, Julien Timor. Le concept de vulnérabilité et ses limites dans l’analyse des socio-écosystèmes exploités. Vulnérabilité(s) environnementale(s). Perspectives pluridisciplinaires. 2023. Rahma Bentirou Mathlouthi (Dir.), Adelie Pomade (Dir.), Sylvia Becerra (Préf.). Collection Environnement. ISBN : 978-2-14-034476-3. pp. ??, 2023. ⟨hal-04309721⟩
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