Ruser avec les violences de l'évidence
Résumé
Dans les interactions quotidiennes chacun-e est confronté-e à des attributions (genre, âge, ethnie, statuts, classe...) qui peuvent sembler créer une situation de différenciation défavorable. C'est souvent le cas pour les personnes en conversion (reprise d'études) dans le travail social. Ces formations (notamment celles de niveau 3 comme " éducateur spécialisé " et " assistant de service social ") sont en effet particulières : elles se présentent comme construction de la " posture professionnelle " et de la " bonne distance ", mais sont très genrées dans leurs recrutements, dans les représentations d'elles socialement admises et dans les " qualités " attendues chez les candidates et les procédures de travail de la profession (écoute, care, attente de dévoilement chez l'usager). La conversion dans le travail social est donc une socialisation à un certain type de genre qui occasionne des situations de décalage où les évidences des attributions identitaires peuvent être vécues comme des impositions discriminantes pour celle/celui qui est " au mauvais endroit au mauvais moment ". Dans ce contexte, je travaille sur la singularisation de genre, définie comme la tactique que l'on met en oeuvre pour sauver la face - dans l'interaction - quand on se trouve confronté-e à un jugement normatif de genre que l'on considère réducteur et/ou défavorable, en jouant sur différentes définitions de soi et en promouvant des normes de genre relatives.