Le "Droit à l'enfant" nouveau droit de l'homme ?
Abstract
L'examen de la portée de l'émergence d'un droit à l'enfant dans la jurisprudence de la Cour Européenne des droits de l'homme, sur le fondement de l'article 8 de la Convention européenne, nous a permis d'établir qu'appliquée au droit de devenir parent la théorie des obligations positives est encore hésitante et laisse ouvert le champ des implications de cette disposition au regard de la protection d'un droit à l'enfant. Toutefois, face à l'affirmation d'une obligation positive de l'Etat au titre d'un droit à l'enfant et aux enjeux de la biomédecine, la marge d'appréciation des Etats membres pourrait être prochainement restreinte compte tenu de la nécessité d'une harmonisation des solutions dans le domaine de l'assistance médicale à la procréation (AMP) qui requiert davantage de prégnance de la norme surpranationale. Cela d'autant plus que l'absence de règles communes en Europe et le "tourisme procréatif" engendré par les différentes législations suscitent l'inquiétude. La libéralisation de l'assistance médicale à la procréation dans plusieurs Etats européens est ainsi susceptible de conduire à la juridiction européenne à imposer aux Etats membres la mise en oeuvre de certaines garanties pour rendre effectif un droit à l'AMP, sur le fondement du droit au respect de la vie privée et familiale. En outre, si nombre d'Etats européens légalisaient et encadraient la maternité pour autrui, la Cour européenne des droits de l'homme pourrait décider de l'imposer aux autres en condamnant au cas par cas les Etats récalcitrants, au au nom du respect de la vie privée et familiale de l'enfant né par gestation pour autrui et de la mère d'intention, surtout si elle est aussi la mère génétique. Au regard de l'évolution de la jurisprudence européenne, il revient à la loi de concilier la promotion d'une politique de valorisation de l'enfant équilibrée avec subjectivisation des droits de l'adulte avec l'enfant. Or la difficulté d'harmoniser un droit fondamental à l'enfant avec les obligations constitutionnelles inhérentes aux droits de l'homme et le doute quant à la portée des obligations positives pour l'Etat au titre d'un droit à l'enfant sont sources d'incertitudes concernant l'autonomie dont dispose le législateur à cette fin.