La politique mexicaine de lutte contre les violences faites aux femmes donne au système de santé un rôle important, à la fois d'éducateur des femmes quant à leurs droits et de détecteur des violences, en plus de leur rôle de traitement de leurs conséquences physiques. On peut se demander dans quelle mesure les médecins adhèrent à ce nouveau rôle et partagent cette dénonciation de la violence de genre dans une société qui reste profondément machiste et autoritaire. Ainsi, de nombreuses dénonciations ont été faites des stérilisations imposées aux femmes, notamment autochtones, par ce même système de santé. La dénonciation de la violence conjugale de paysans mayas pauvres ne permet-elle pas de mettre en avant une masculinité hégémonique au détriment d'une masculinité soumise (Connell 2002) et de finalement réaménager la domination masculine en masquant la violence structurelle du système de santé (Verley 2003) ? Une enquête, menée de septembre 2004 à début janvier 2005 dans les 60 communes de l'ex-zone du hénéquen, permettra de répondre à ces questions en analysant tant les discours de 205 membres du personnel sanitaire que des observations de cours donnés par ce personnel à des femmes et que les réponses apportées à un questionnaire par 519 hommes et 988 femmes. Cette approche relève donc d'une perspective qui considère l'intersectionnalité des rapports sociaux, qu'ils soient de genre, de classe ou de la construction sociale des " races " (West et Fenstermaker 1995).