Dès la guerre des Paysans, les révoltés ont utilisé l'écrit comme mode de diffusion et de légitimation de leurs revendications. De même, les troubles sociaux de la fin du XVIIIe siècle auraient selon les contemporains été encouragés par les nouvelles de la Révolution française et les pamphlets de leurs « suppôts » en Allemagne. Là ne s'arrête pas le lien de la résistance paysanne avec la culture de l'écrit. Il concerne aussi le combat judiciaire que mènent les ruraux contre leurs seigneurs. Cette pratique, très répandue dans l'Allemagne du Sud et de l'Ouest, suppose qu'une partie du village au moins ait été capable d'entamer un dialogue plus ou moins sophistiqué par le biais de l'écrit avec les autorités et les instances judiciaires, ce que démontrent plusieurs exemples. La troublante coïncidence entre Grundherrschaft, fortes communautés paysannes, résistances judiciaires ou révoltes fréquentes, et fort niveau d'alphabétisation permet de supposer que les formes que prennent la contestation politique en milieu rural entretiennent un lien dialectique et circulaire avec la précocité de l'entrée des campagnes dans la culture de l'écrit, et les formes de seigneurie et de structures agraires qui favorisent les organisations villageoises autonomes. Ainsi s'expliquent à la fois les contrastes et les superpositions géographiques des révoltes et de la scolarisation du sud-ouest au nord-est de l'Allemagne.