Le réalisme moral d'Elizabeth Anscombe : une philosophie de l'intégrité - Archive ouverte du site Alsace
Thèse Année : 2024

Elizabeth Anscombe's Moral Realism : a Philosophy of Integrity

Le réalisme moral d'Elizabeth Anscombe : une philosophie de l'intégrité

Résumé

For Elizabeth Anscombe, every effort at goodness is also a quest for truth. Moral vigilance takes the form of a Daimôn reminding each person of the task of examining their life: ‘Perhaps in some way, I can’t see, I may be on a bad path, perhaps I am hopelessly wrong in some essential way*.’ This thesis argues that Anscombe is developing an original type of moral realism centred on the notion of integrity and polarised by one question: how does a person come to grasp, as rigorously as possible, the meaning and gravity of their actions? According to her, three conditions are necessary in order to correctly assess the weight of our actions – they provide the blueprint for our work: we need to know what we are actually doing, we need to have some idea of the necessities of our human nature and, finally, we need to recognise the infinite value of this nature.To know what they are doing, the person must be able to identify the criteria for ‘what counts as a relevant description of an action’. This is precisely what Anscombe sets out to do in her study of intention. She shows that it is possible to isolate types of action which we know that, if we do them intentionally, we are in the wrong. The category of "intrinsically unjust act" becomes available again, providing the starting point for a realist moral epistemology.The person also needs to justify their assessments by basing them on a thorough understanding of the human being. Here again, Anscombe makes a major shift by restoring consistency to the concept of human nature. She relies on the idea that we learn something about the kind of being that humans are by unfolding the logical form of their linguistic practices. Her meta-ethics revolves around an often-unnoticed axis, combining Aristotle’s naturalism and Wittgenstein’s logical grammar.Finally, an action will only be true on a moral level if it manifests the “mystical” value of human nature. Bringing this aspect to light is the most innovative contribution of this thesis. An in-depth study of the ethico-religious texts reveals the core of her metaphysical anthropology: humans are not only rational animals, but also spiritual beings, endowed with a dignity that we can know through “connaturality” or “mystical perception”.By exploring the various facets of Anscombean moral realism, we can ultimately clarify its role in the contemporary ethical debate on absolutism. Are certain acts to be rejected absolutely, whatever the cost to the well-being of the person or the consequent situation? For Anscombe, the answer is yes. But this cannot be done either at the expense of personal discernment or at the cost of alienation. Her way of conceiving the human makes it possible to resolve the tension by establishing that the prohibition does not need to be decreed by an external authority to be absolute. It can be imposed internally on the agent, as compelling evidence, due to their spiritual nature.*G. E. M. Anscombe, ‘Modern Moral Philosophy’ in Ethics, Religion and Politics, Collected Philosophical Pa-pers III, Oxford, Blackwell, 1981, p. 37.Keywords: moral realism, integrity, absolutism, philosophy of action, moral epistemology, meta-ethics, naturalism, logical grammar, mystical perception, connaturality, metaphysical anthropology, spiritual nature.
Pour Elizabeth Anscombe, tout effort de bonté est indissociablement une quête de vérité. La vigilance morale prend chez elle la forme d’un Daimôn rappelant à chacun la tâche d’examiner sa vie : « Peut-être que d’une manière que je ne vois pas, je me trompe désespérément sur une chose essentielle*. » Cette thèse défend l’idée qu’Anscombe élabore un type original de réalisme moral centré sur la notion d’intégrité et polarisé par une question : comment une personne parvient-elle à saisir, le plus rigoureusement possible, le sens et la gravité de ses actions ? Selon elle, trois conditions sont nécessaires afin d’évaluer correctement le poids de nos actes — elles donnent le plan de notre travail : on a besoin de savoir ce qu’on fait effectivement, on doit avoir une certaine idée des nécessités liées à sa nature d’humain et enfin, on doit reconnaître l’infinie valeur de cette nature.Pour savoir ce qu’elle fait, la personne doit pouvoir identifier les critères de « ce qui compte comme une description pertinente d’une action.» Or c’est précisément ce à quoi s’attèle Anscombe dans son étude de l’intention. Elle montre qu’il est possible d’isoler des types d’actions dont nous savons que, si nous la faisons intentionnellement, nous sommes dans le faux. La catégorie d’« acte intrinsèquement injuste » redevient disponible, offrant ainsi le point de départ d’une épistémologie morale réaliste.Pour être intègre, la personne a, par ailleurs, besoin de justifier ses évaluations en les fondant sur une compréhension approfondie de la forme de vie des humains. Là encore, Anscombe opère un déplacement majeur en donnant une nouvelle consistance au concept de nature humaine. Elle s’appuie sur l’idée que nous apprenons quelque chose sur la sorte d’être que sont les humains en dépliant la forme logique de leurs pratiques linguistiques. Sa méta-éthique gravite autour d’un axe souvent inaperçu, combinant le naturalisme d’Aristote et la grammaire logique de Wittgenstein.Enfin, une action ne sera vraie sur le plan moral qu’à la condition de manifester la valeur « mystique » de la nature humaine. La mise au jour de cet aspect constitue l’apport le plus novateur de cette thèse. L’étude approfondie des textes éthico-religieux permet de dégager le cœur de son anthropologie métaphysique : les humains sont non seulement des animaux rationnels, mais aussi des êtres spirituels, doués d’une dignité que nous pouvons connaître par « connaturalité » ou par « perception mystique ».L’exploration des différentes facettes du réalisme moral anscombéen permet, in fine, de préciser son rôle dans le débat éthique contemporain sur l’absolutisme. Certains actes sont-ils à refuser absolument, quoiqu’il en coûte du bien-être de la personne ou de la situation conséquente ? Pour Anscombe, la réponse est oui. Mais cela ne peut se faire ni au détriment du discernement personnel ni au prix d’une aliénation. Sa manière de concevoir l’humain permet de résoudre la tension en établissant que l’interdit n’a pas besoin d’être décrété par une autorité extérieure pour être absolu. Il peut s’imposer intérieurement à la personne, comme une évidence impérieuse, en raison de sa nature spirituelle.*G.E.M. Anscombe, « La philosophie morale moderne », traduit par G. Ginvert et P. Ducray, Klesis-Revue Philo-sophique. Actualité de la philosophie analytique, 2008, no 9, p. 25.Mots-clés : réalisme moral, intégrité, absolutisme, philosophie de l’action, épistémologie morale, méta-éthique, naturalisme, grammaire logique, perception mystique, connaturalité, anthropologie métaphysique, nature spirituelle.
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Citer

Blandine Lagrut. Le réalisme moral d'Elizabeth Anscombe : une philosophie de l'intégrité. Philosophie. Université de Lorraine, 2024. Français. ⟨NNT : 2024LORR0107⟩. ⟨tel-04836824⟩
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